Santé physique et médicaments psychiatriques

Effets secondaires, Médicaments, Revues Pro

Une revue de littérature publiée récemment récapitule les risques pour la santé physique associés à la prise des médicaments psychotropes. Il s’agit en réalité de la mise à jour d’une précédente revue de 2011.

J’ai tenté d’en prélever les informations que j’estime les plus pertinentes.

1. La maladie mentale sévère est associée à une espérance de vie diminuée de 10 à 25 ans

Le taux de mortalité est supérieur de 2 à 3 fois à celui de la population générale. Les maladies les plus concernées sont la schizophrénie, le trouble bipolaire et la dépression.

2. Les causes les plus fréquentes de ce phénomène sont les maladies physiques

Il s’agit en premier lieu de problèmes nutritionnels (ex. obésité), métaboliques (ex. dyslipidémies), endocriniens (ex. diabète) et cardiovasculaires.

3. Les effets secondaires des médicaments psychotropes y contribuent

Les autres facteurs favorisants sont la stigmatisation, le mauvais accès aux soins, la plus grande difficulté à diagnostiquer des maladies physiques du fait de la symptomatologie psychiatrique et le mode de vie généralement moins sain. La mortalité des patients qui ne prennent pas de médicaments est cependant supérieure, notamment en raison de leur rôle souvent protecteur vis-à-vis du suicide.

4. Le risque de prise de poids est plus élevé dans les premières semaines de traitement

Les médicaments les plus pourvoyeurs restent les antipsychotiques de seconde génération mais chaque classe reste concernée : neuroleptiques, stabilisateurs de l’humeur, et antidépresseurs. Les patients vierges de tout traitement sont les plus vulnérables. Généralement rapide dans les premières semaines, cette prise de poids ralentit par la suite pour atteindre un plateau aux alentours d’un an.

5. Tous les neuroleptiques ne sont pas égaux en matière de prise de poids

Parmi les antipsychotiques de seconde génération :

  • Clozapine (Leponex) : risque élevé
  • Olanzapine (Zyprexa) : risque élevé
  • Quétiapine (Xeroquel) : risque intermédiaire
  • Rispéridone (Risperdal) : risque intermédiaire
  • Aripiprazole (Abilify) : risque inférieur
  • Lurasidone (Latuda) : risque inférieur
  • Amisulpride (Solian) :  risque inférieur

Au sein des neuroleptiques dit « classiques », le risque est plus élevé avec les molécules utilisées à visée sédative parmi lesquelles la chlorpromazine (Largactil) et la cyamémazine (Tercian). Les neuroleptiques plus spécifiquement « antidélirants » sont associés à un moindre risque, notamment l’halopéridol (Haldol).

6. Les autres médicaments psychiatriques sont aussi concernés

Parmi les antidépresseurs, les plus à risque sont la mirtazapine (Norset), la paroxétine (Deroxat) et la classe plus ancienne des tricycliques dont les plus utilisés sont la clomipramine (Anafranil) et l’amitriptyline (Laroxyl).

Au sein des stabilisateurs de l’humeur, le valproate (Depakine, Depakote, Depamide) et le lithium sont les plus régulièrement associés à une prise de poids.

7. Les neuroleptiques favorisent l’augmentation des taux de lipides

Ce phénomène peut découler de la prise de poids mais des mécanismes indépendants sont aussi suspectés. Les anomalies les plus fréquentes sont l’élévation du taux de triglycérides et la diminution du taux de « bon » cholestérol (HDL). Les autres médicaments ne sont pas concernés à ce niveau, du moins en dehors des conséquences de la prise de poids. Le valproate (Dépakine/kote/mide) est même associé à une diminution du taux de « mauvais » cholestérol.

8. Les neuroleptiques sont associés à une augmentation du risque de diabète de type 2

La schizophrénie et le trouble bipolaire sont associés à une prévalence du diabète deux à trois fois plus importante et à sa survenue 10 à 20 ans plus tôt. Tous les neuroleptiques ne sont pas égaux en la matière, les risques respectifs demeurant superposables à ceux de la prise de poids (voir 5.).

9. Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de décès en cas de maladie psychiatrique sévère.

Le risque est à ce niveau 10 fois plus élevé que celui du suicide.

Il peut s’agir de maladie coronarienne dont la complication majeure est l’infarctus du myocarde ou d’accidents cérébrovasculaires (AVC). Le mécanisme associant ce risque aux neuroleptiques n’est pas encore clairement élucidé mais ce phénomène ne serait pas systématiquement lié à la prise de poids. Ce sont cependant les molécules les plus associées à une prise de poids qui sont à nouveau les plus mises en cause (voir 5.)

Il peut également s’agir de mort subite par trouble du rythme. Le risque est 2 à 4 fois plus élevé en cas de schizophrénie. Les molécules les plus à risque sont celles qui allongent le plus la durée de repolarisation ventriculaire. Il s’agit en premier lieu des neuroleptiques, les plus à risque étant le pimozide (Orap), l’halopéridol (Haldol) et l’amisulpride (Solian) mais également de certains antidépresseurs : les tricycliques (voir plus haut) et certains inhibiteurs de la recapture de la sérotonine comme le citalopram (Seropram).

10. Les neuroleptiques sont associés à un risque plus élevé de pneumonie

La pneumonie figure parmi les causes de décès les plus fréquentes chez les patients atteints de maladie mentale sévère et les neuroleptiques peuvent y contribuer. La clozapine reste la molécule la plus à risque mais les autres antipsychotiques de seconde génération sont également en cause. Les antidépresseurs et stabilisateurs de l’humeur ne semblent pas concernés par ce risque.

11. De nombreux médicaments psychiatriques perturbent le fonctionnement du foie

Les perturbations du bilan hépatique sont fréquentes sous neuroleptiques (environ 1/3 des patients sont concernées) mais le plus souvent sans conséquences et asymptomatiques. Jusqu’à 3% des patients sous antidépresseurs peuvent également présenter de telles perturbations. Les molécules les plus à risques sont la venlafaxine (Effexor), la duloxétine (Cymbalta), l’agomélative (Valdoxan) ainsi que les tricycliques. Parmi les stabilisateurs de l’humeur, le valproate (Dépakine/kote/mide) et la carbamazépine (Tégrétol) sont les plus toxiques pour le foie.

12. Les risques liés à la constipation sont souvent négligés ou sous estimés

Les complications les plus graves (paralytiques, occlusives ou perforantes) peuvent être mortelles, notamment chez les personnes âgées. Les médicaments les plus concernés sont les neuroleptiques, notamment la clozapine (Leponex) et les antidépresseurs tricycliques.

13. De nombreux médicaments psychiatriques peuvent faire chuter le taux de globules blancs

La clozapine (Leponex) est souvent mise en avant et bénéficie de mesures de surveillance assez strictes à ce niveau. Ce risque est néanmoins associé à tous les antipsychotiques, à certains antidépresseurs (à nouveau les tricycliques), et aux anticonvulsivants utilisés comme stabilisateurs de l’humeur. Parmi ces derniers, la carbamazépine (Tégrétol) est la première concernée et son association à la clozapine est logiquement contre-indiquée.

14. Certains médicaments psychiatriques fragilisent les os

Il s’agirait à nouveau des neuroleptiques et de certains antidépresseurs (les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine). Le risque de fracture ou de tassement vertébral peut donc augmenter.

15. Les neuroleptiques favorisent les troubles moteurs et l’épilepsie

La prise de neuroleptiques au long cours favorise l’apparition des formes « tardives » d’akathisie, de dystonie et de dyskinésie qui, contrairement à leurs formes « précoces », ne bénéficient pas encore à l’heure actuelle de remède très efficace. Ce risque était initialement considéré comme nul avec les antipsychotiques de seconde génération mais il n’est finalement que 5 à 6 fois inférieur à celui des anciennes molécules.

Les neuroleptiques, tout comme certains antidépresseurs, abaissent le seuil épileptogène, un phénomène qui reste modéré mais tout de même à prendre en compte, notamment chez les épileptiques. Du coté des stabilisateurs de l’humeur, l’effet est plutôt protecteur, ce qui n’est pas étonnant compte tenu du fait que la plupart sont des anticonvulsivants.

CONCLUSION

Les médicaments psychiatriques sont donc à considérer comme un facteur d’importance dans l’émergence et l’aggravation de maladies physiques chez les patients atteints de troubles psychiatriques. Les effets secondaires sont associés, par importance décroissante aux neuroleptiques dans leur ensemble, aux stabilisateurs de l’humeurs, aux antidépresseurs tricycliques et aux antidépresseurs plus récents.

Cet impact physique néfaste doit être davantage pris en compte, notamment chez les patients les plus sévèrement atteints pour lesquels, à l’heure actuelle, les mesures non médicamenteuses sont plutôt complémentaires que de réelles alternatives.

Neuroleptiques [FAQ]

Effets secondaires, FAQ, Neuroleptiques

Voici les questions qui me sont fréquemment posées lorsqu’il est question d’instaurer un traitement neuroleptique. Je ne suis pas en mesure de garantir que mes réponses soient superposables à celles de mes confrères français que j’encourage vivement à me critiquer s’ils le jugent nécessaire. Par ailleurs, dans le cas où certaines réponses ne seraient pas suffisamment claires je m’engage à tenter d’y remédier, tout comme je pourrai rajouter d’autres questions selon les suggestions des lecteurs.

Les neuroleptiques, c’est pour les fous?

Pas forcément, et pas seulement.

Les neuroleptiques sont avant tout des calmants, des tranquillisants initialement qualifiés de majeurs qui peuvent être prescrits en cas d’agitation. Certains d’entre eux ciblent davantage l’agitation intérieure, notamment émotionnelle ou liée à un emballement des pensées tandis que d’autres ciblent surtout l’agitation motrice.

Ces médicaments peuvent donc aider à calmer un délire, et se révèleront d’autant plus efficaces que ce délire est envahissant, caractérisé par une forte participation émotionnelle (ex. angoisse, colère, euphorie) et/ou source de troubles du comportement.

Comme pour la plupart des psychotropes, les progrès effectués en matière de tolérance ont abouti à un élargissement progressif des indications officielles qui concernent aujourd’hui :

  • Les troubles du comportement et l’agitation
  • Certains symptômes délirants (ex. hallucinations)
  • La schizophrénie
  • Le trouble bipolaire
  • Certaines formes d’anxiété
  • Certaines dépressions
  • L’insomnie

Enfin, les neuroleptiques peuvent également être prescrits à long terme dans le but de prévenir d’éventuelles rechutes.

Les neuroleptiques, comment ça marche?

Ce qui définit l’action neuroleptique, c’est le freinage de la transmission de dopamine dans le cerveau. Cela permet de se détacher, de mettre à distance certaines pensées ou émotions lorsqu’elles sont trop envahissantes mais également de réduire l’activité motrice lorsque celle-ci devient problématique (ex. certains troubles du comportement).

Les neuroleptiques agissent également sur la transmission d’autres substances, que ce soit dans le cerveau ou ailleurs, de façon variable suivant le médicament concerné, ce qui peut aboutir en pratique à des effets plus ou moins recherchés comme par exemple la sédation.

Les neuroleptiques, ça transforme en zombie?

Ce phénomène correspond à des effets secondaires extrapyramidaux qui, lorsque très intenses, aboutissent à la fameuse allure schizophrénique : raideur, ralentissement, difficulté à initier des mouvements, tremblements lents, indifférence, visage figé et tendance à baver. Ces symptômes similaires à ceux de la maladie de Parkinson surviennent lorsque les doses sont trop élevées, le neuroleptique faisant alors office de véritable camisole chimique.

Longtemps considérés comme le prix à payer pour obtenir l’efficacité, voire comme un signe d’efficacité, ces effets extrapyramidaux peuvent et doivent être évités, en collaboration avec le prescripteur :

  • Par une augmentation très progressive des doses
  • Par une diminution des doses s’ils surviennent
  • Par un changement de traitement au profit d’un neuroleptique moins pourvoyeur de ce genre d’effets (ex. clozapine, quétiapine)
  • Par l’ajout d’un médicament dit « correcteur »

Les neuroleptiques, ça shoote, ça transforme en légume?

L’effet sédatif de certains neuroleptiques est parfois très prononcé, ce qui peut se révéler bénéfique si le niveau d’éveil est trop élevé (ex. anxiété, insomnie). En revanche, plusieurs effets indésirables et invalidants peuvent découler de cette sédation : la diminution de la vigilance (ex. conduite), la somnolence en journée, l’augmentation du temps de sommeil, les difficultés de concentration etc.

Ces désagréments conduisent encore très souvent les patients à interrompre brutalement le traitement, ceci alors qu’il existe des solutions moins risquées à adopter en collaboration avec le prescripteur parmi lesquelles :

  • Décaler si possible la prise du traitement le soir au coucher
  • Diminuer la dose
  • Remplacer le neuroleptique par un autre moins pourvoyeur de sédation (ex. aripiprazole).

Les neuroleptiques, ça rend obèse?

La prise de poids n’est pas rare et conduit aussi très fréquemment les patients à suspendre brusquement la prise d’un neuroleptique. Il s’agit parfois de quelques kilos, parfois de plus mais ce n’est pas systématique. Cumulée au tabagisme et au manque d’exercice physique, cette prise de poids peut s’accompagner d’une augmentation de la tension artérielle, des taux de graisses et de sucre dans le sang, le tout finissant par augmenter le risque cardiovasculaire. C’est ce qu’on appelle le syndrome métabolique. Là encore, une simple diminution de la dose peut parfois suffire et un changement de neuroleptique est indiqué si le poids augmente rapidement après l’instauration.

Les neuroleptiques, c’est pour la vie?

Il reste aujourd’hui très difficile voir impossible de prévoir la façon dont va évoluer un problème psychiatrique à très long terme. Un neuroleptique se prescrit donc avant tout à court terme pour calmer un épisode aigu, et à moyen terme pour prévenir les récidives, parfois pendant plusieurs années. Le rapport entre les bénéfices et les risques liés à ce traitement doit être réévalué le plus souvent possible avec le médecin. Dans la mesure du possible, toute décision concernant le maintien, la diminution ou l’interruption d’un neuroleptique doit résulter d’un accord entre le patient et son prescripteur.

Les neuroleptiques, ça rend accro?

Hélas encore niée par une grande partie du corps médical, la dépendance aux neuroleptiques existe pourtant et se caractérise par des symptômes de sevrage à l’arrêt du traitement. Ceux-ci peuvent être difficiles à distinguer des symptômes pour lesquels le neuroleptique était prescrit initialement (anxiété, insomnie, agitation) si bien qu’un sevrage est fréquemment confondu avec une rechute qu’il peut par ailleurs favoriser.

Certains signes physiques sont évocateurs de ce syndrome de sevrage :

  • Nausées, vomissements
  • Diarrhée
  • Perte d’appétit
  • Écoulement nasal
  • Hypersudation
  • Douleurs musculaires
  • Troubles de la sensibilité

Dans la plupart des cas, la réintroduction du neuroleptique permet de soulager les symptômes.

La meilleure façon d’éviter ce genre de complication reste la diminution très progressive du traitement, qui devra toujours s’effectuer en collaboration avec le prescripteur.

Les neuroleptiques, il n’y a aucune alternative?

Les réelles alternatives sont rares et plutôt à considérer comme des mesures complémentaires. Lorsque les symptômes sont importants, lorsqu’ils sont source d’une dangerosité pour soi ou pour les autres, lorsqu’il faut agir en urgence, les neuroleptiques sont souvent la meilleure solution. D’autres tranquillisants existent, notamment les benzodiazépines, mais celles-ci restent moins efficaces pour se distancer des préoccupations délirantes (ex. hallucinations, sentiment de persécution) et ne sont pas dénuées d’effets secondaires également.

La thérapie cognitive et comportementale donne quelques bons résultats pour gérer les hallucinations mais elle nécessite la collaboration active du patient, ce qui n’est pas toujours possible.

Il existe d’autres traitements pour prévenir les rechutes d’un trouble bipolaire, notamment le lithium et certains anticonvulsivants. En revanche, concernant la schizophrénie, aucun autre traitement n’a montré d’efficacité en prévention des rechutes.

L’homéopathie, la phytothérapie (« les plantes ») et autres médecines non conventionnelles (douces, naturelles, alternatives, parallèles etc.) ne peuvent en aucun cas constituer une alternative aux neuroleptiques, tout comme la psychanalyse dont les bénéfices semblent se limiter à la prise en charge de certains troubles de la personnalité.

Un meilleur antipsychotique ?

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De nombreuses idées reçues sont relayées au sujet des neuroleptiques, souvent bien entretenues par l’industrie pharmaceutique, l’expérience personnelle des prescripteurs ou encore la frontière floue séparant les « vielles » (classique) et les « nouvelles » (atypiques) molécules. Il existe parfois davantage de différences entre deux médicaments d’une même classe que d’une classe à l’autre, notamment en ce qui concerne les effets secondaires. Ce sont d’ailleurs ces profils variés d’effets indésirables qui semblent le mieux pouvoir aider le prescripteur à choisir la molécule la plus adaptée à son patient, ceci étant donné que les différences d’efficacités sont en général considérées comme non significatives.

Une revue récente de littérature publiée sur le site internet d’une revue prestigieuse (The Lancet) parvient à hiérarchiser 15 neuroleptiques selon l’efficacité sur les symptômes schizophréniques, l’interruption du traitement, la prise de poids, les symptômes extra-pyramidaux, l’augmentation de la prolactine, le risque de troubles du rythme cardiaque (allongement QTc) et enfin la sédation. Les différences relevées sont intéressantes et dépassent effectivement le clivage classique/atypique. Par ailleurs, il semblerait que des différences existent bel et bien en matière d’efficacité.

Les 15 molécules prises en compte sont, par ordre alphabétique :

  • Amisulpride (SOLIAN®)
  • Aripiprazole (ABILIFY®)
  • Asénapine (SYCREST®)
  • Chlorpromazine (LARGACTIL®)
  • Clozapine (LEPONEX®)
  • Halopéridol (HALDOL®)
  • Ilopéridone (non disponible en France)
  • Lurasidone (non disponible en France)
  • Olanzapine (ZYPREXA®)
  • Palipéridone (XEPLION®)
  • Quétiapine (XÉROQUEL®)
  • Rispéridone (RISPERDAL®)
  • Sertindole (non disponible en France)
  • Ziprasidone (non disponible en France)
  • Zotépine (non disponible en France)

Voici les différents classements, dans lesquels je n’ai retenu que les molécules disponibles en France :

Amélioration des symptômes

  1. Clozapine
  2. Amisulpride
  3. Olanzapine
  4. Rispéridone
  5. Palipéridone
  6. Halopéridol
  7. Quétiapine
  8. Aripiprazole
  9. Chlorpromazine
  10. Asénapine

La clozapine se révèle donc fidèle à sa réputation et devance de loin l’amusulpride que l’on n’aurait pas imaginé à cette place (non disponible aux USA donc peu pris en compte dans les études américaines). La réputation d’un aripiprazole dont l’efficacité serait légèrement inférieure à celle de ses rivaux en France est également confirmée ici.


Les moins interrompus (toutes causes confondues)

  1. Amisulpride
  2. Olanzapine
  3. Clozapine
  4. Palipéridone
  5. Rispéridone
  6. Aripiprazole
  7. Quétiapine
  8. Chlorpromazine
  9. Asénapine
  10. Halopéridol

Là encore, l’amisulpride surprend et par ailleurs, les molécules que l’on considère comme les mieux tolérées ne semblent pas forcément les moins interrompues (ex. olanzapine bien devant l’aripiprazole).


Le moins de prise de poids

  1. Halopéridol
  2. Aripiprazole
  3. Amisulpride
  4. Asénapine
  5. Palipéridone
  6. Rispéridone
  7. Quétiapine
  8. Chlorpromazine
  9. Clozapine
  10. Olanzapine

Aucune grande surprise n’apparaît ici, si ce n’est encore la bonne performance de l’amisulpride. Olanzapine, clozapine et quétiapine restent les molécules les plus grossissantes tandis que l’aripiprazole et l’haldol apparaissent bien moins néfastes sur le plan métabolique.


Le moins d’effets secondaires extrapyramidaux (parkinsoniens)

  1. Clozapine
  2. Olanzapine
  3. Quétiapine
  4. Aripiprazole
  5. Amisulpride
  6. Asénapine
  7. Palipéridone
  8. Rispéridone
  9. Chlorpromazine
  10. Halopéridol

Loin devant, la clozapine reste d’ailleurs le seul neuroleptique indiqué en cas de maladie de parkinson. Structurellement proches, la quétiapine et l’olanzapine suivent tandis que l’halopéridol reste bon dernier, derrière la rispéridone et la palipéridone dont le profil extrapyramidal rejoint celui de l’halopéridol en augmentant les doses.


Le moins d’hyperprolactinémie

  1. Aripiprazole
  2. Quétiapine
  3. Asénapine
  4. Olanzapine
  5. Chlorpromazine
  6. Halopéridol
  7. Rispéridone
  8. Palipéridone

L’augmentation excessive de l’hormone de la lactation peut avoir des conséquences telles que des perturbations plus ou moins marquées de la sexualité, de la fertilité, de la solidité des os, provoquer des galactorrhées, et des gynécomasties chez l’homme. Les molécules les plus susceptibles d’y parvenir sont la rispéridone et son proche cousin la palipéridone, devant l’haldol ce qui pourra surprendre éventuellement. Clozapine et amisulpride n’ont pu être inclus dans le classement. À titre indicatif, je les aurais respectivement placés dans la première moitié du classement, et dans la seconde.


Le moins de troubles du rythme cardiaque (moindre allongement de l’espace QTc)

  1. Aripiprazole
  2. Palipéridone
  3. Halopéridol
  4. Quétiapine
  5. Olanzapine
  6. Rispéridone
  7. Asénapine
  8. Amisulpride

La clozapine et la chlorpromazine n’ont pas pu être pris en compte mais ne figureraient probablement pas dans les premières places. L’aripiprazole garde ici une confortable avance devant la palipéridone et l’halopéridol dont la performance ici peut encore une fois paraître surprenante.


Les moins sédatifs

  1. Amisulpride
  2. Palipéridone
  3. Aripiprazole
  4. Rispéridone
  5. Halopéridol
  6. Asénapine
  7. Olanzapine
  8. Quétiapine
  9. Chlorpromazine
  10. Clozapine

L’amisulpride s’en sort à nouveau très bien mais il faut garder en tête que la sédation peut beaucoup monter avec la dose employée. De ce point de vue, la palipéridone semble représenter un réel progrès par rapport à la rispéridone. L’aripiprazole se démarque également tandis que le trio olanzapine quétiapine clozapine ferme la marche, le dernier se révélant encore plus sédatif que la chlorpromazine qui est utilisée spécifiquement pour sédater, c’est dire…


Conclusion

Malgré de réelles différences en matière d’efficacité, ce sont les profils très variés d’effets secondaires qui restent les plus significatifs.

  • Qui veut limiter les effets secondaires dans leur ensemble réduira les doses.
  • Qui veut limiter la sédation évitera dans la mesure du possible la clozapine, la quétiapine et l’olanzapine.
  • Qui veut limiter la prise de poids et les problèmes métabolique évitera à peu de choses près les mêmes.
  • Qui veut limiter les effets secondaires extrapyramidaux évitera si possible l’halopéridol, voire la rispéridone
  • Le meilleur compromis pour limiter les effets secondaires demeure l’aripiprazole qui reste aussi et malheureusement l’un des moins efficaces.

Leucht S and al. Comparative efficacy and tolerability of 15 anti-psychotic drugs in schizophrenia: a multiple-treatments meta-analysis. The Lancet, Early Online Publication, 27 June 2013.

Doc? On arrête quand les médocs?

Neuroleptiques, Revues Pro, Troubles psychotiques

Les psychiatres les plus embarrassés par cette question sont certainement ceux qui savent à quel point la réponse peut déterminer la suite de la prise en charge. Dans le cas d’un premier épisode psychotique, la recherche nécessaire d’un compromis avec le patient doit tenir compte d’une multitude de facteurs dont certains peuvent être difficiles à cerner au moment où la question se pose. Parmi ceux-ci, le risque de rechute tient évidemment une place importante, parfois au point de négliger les effets secondaires invalidants que peuvent procurer les neuroleptiques, ce qui peut avoir des conséquences désastreuses.

La plupart des études sur le sujet se limitent à du court terme, en général 18 mois, et plaident en faveur du maintien de ces neuroleptiques. La plupart des recommandations se basent sur ces données, notamment la HAS qui recommande de poursuivre le traitement pendant au moins deux ans après un premier épisode. Si l’effet de ce maintien systématique est bénéfique sur le taux de rechute pendant les deux premières années, on pourrait aisément en déduire que les patients s’en portent mieux après. Or cette étude néerlandaise récente suggère le contraire.

Elle concerne une centaine de patients parmi les 257 ayant participé à une première étude il y a plus de dix ans suite à un premier épisode psychotique. Ceux pour qui le traitement avait été diminué et/ou interrompu pendant les deux premières années, et qui rechutaient davantage durant cette période, témoignent d’un taux de rémission plus de deux fois supérieur sept ans plus tard. Il semble que pour certains patients, le rapport bénéfices/risques de l’imprégnation neuroleptique s’inverse plus ou moins rapidement après le premier épisode, ce qui pourrait remettre en question le maintien du traitement en prévention des rechutes. Les nombreux biais de cette étude dissuadent logiquement les auteurs de tirer toute conclusion définitive tant que ces résultats n’auront pas été suffisamment répliqués.

 


Lex Wunderink, Roeline M. Nieboer, Durk Wiersma, Sjoerd Sytema, Fokko J. Nienhuis. Recovery in Remitted First-Episode Psychosis at 7 Years of Follow-up of an Early Dose Reduction/Discontinuation or Maintenance Treatment Strategy:Long-term Follow-up of a 2-Year Randomized Clinical TrialJAMA Psychiatry. 2013.

Patrick McGorry, Mario Alvarez-Jimenez, Eoin Killackey. Antipsychotic Medication During the Critical Period Following Remission From First-Episode Psychosis:Less Is MoreJAMA Psychiatry. 2013.

Nancy A. Melville. Antipsychotics in First-Episode Psychosis: Less Is More. Medscape. Jul 16, 2013.

Antidépresseur + neuroleptique dans la dépression?

Effets secondaires, Neuroleptiques, Revues Pro, Troubles de l'humeur

L’efficacité insuffisante des antidépresseurs (dans environ 2/3 des épisodes dépressifs) incite de plus en plus de psychiatres à la prescription complémentaire de neuroleptiques. En France, la seule molécule officiellement autorisée à ces fins reste la quétiapine (Xeroquel®) mais certains n’hésitent pas à s’inspirer de ce qui se fait aux États-Unis où d’autres spécialités sont approuvées : la rispéridone (Risperdal®), l’aripiprazole (Abilify®) et l’OFC qui consiste en une combinaison de fluoxétine (Prozac®) et d’olanzapine (Zyprexa®).

Une équipe américaine a récemment compilé 14 études évaluant cette démarche thérapeutique sur un total de 3549 patients, et sur des durées de traitement s’étalant de 4 à 12 semaines.

Les quatre neuroleptiques améliorent la réponse aux antidépresseurs avec lesquels ils sont prescrits. Si les symptômes et la sévérité de la dépression s’en trouvent réduits, la qualité de vie des patients n’est pas améliorée. La raison principale réside dans la survenue d’effets secondaires parmi lesquels les plus fréquemment rapportés sont la prise de poids, les anomalies métaboliques et la sédation.

Le bilan reste donc contrasté et incite une fois de plus à évaluer en profondeur le rapport bénéfices/risques plutôt que de se livrer à des prescriptions hâtives, et à ne pas oublier que des psychothérapies efficaces existent pour la dépression, à priori sans effets secondaires.

Spielmans, G.L. et al. Adjunctive atypical antipsychotic treatment for major depressive disorder: a meta-analysis of depression, quality of life, and safety outcomes. PLoS Medicine, 10(3), 2013.