Antidépresseur + neuroleptique dans la dépression?

Effets secondaires, Neuroleptiques, Revues Pro, Troubles de l'humeur

L’efficacité insuffisante des antidépresseurs (dans environ 2/3 des épisodes dépressifs) incite de plus en plus de psychiatres à la prescription complémentaire de neuroleptiques. En France, la seule molécule officiellement autorisée à ces fins reste la quétiapine (Xeroquel®) mais certains n’hésitent pas à s’inspirer de ce qui se fait aux États-Unis où d’autres spécialités sont approuvées : la rispéridone (Risperdal®), l’aripiprazole (Abilify®) et l’OFC qui consiste en une combinaison de fluoxétine (Prozac®) et d’olanzapine (Zyprexa®).

Une équipe américaine a récemment compilé 14 études évaluant cette démarche thérapeutique sur un total de 3549 patients, et sur des durées de traitement s’étalant de 4 à 12 semaines.

Les quatre neuroleptiques améliorent la réponse aux antidépresseurs avec lesquels ils sont prescrits. Si les symptômes et la sévérité de la dépression s’en trouvent réduits, la qualité de vie des patients n’est pas améliorée. La raison principale réside dans la survenue d’effets secondaires parmi lesquels les plus fréquemment rapportés sont la prise de poids, les anomalies métaboliques et la sédation.

Le bilan reste donc contrasté et incite une fois de plus à évaluer en profondeur le rapport bénéfices/risques plutôt que de se livrer à des prescriptions hâtives, et à ne pas oublier que des psychothérapies efficaces existent pour la dépression, à priori sans effets secondaires.

Spielmans, G.L. et al. Adjunctive atypical antipsychotic treatment for major depressive disorder: a meta-analysis of depression, quality of life, and safety outcomes. PLoS Medicine, 10(3), 2013.

9 réflexions sur “Antidépresseur + neuroleptique dans la dépression?

    1. Le lamictal (lamotrigine) est un anticonvulsivant utilisé dans l’épilepsie et dans le trouble bipolaire en prévention des rechutes maniaques et dépressives. Il aurait apparemment une action anti dépressive propre suggérée par certaines études, ce qui incitent certains à le prescrire comme traitement adjuvant aux antidépresseurs, mais le niveau de preuve n’est pas fabuleux.

  1. Polémiques autour de DSM V : tout à fait honnêtement, je n’avais pas eu connaissance des sorties de DSM I, II , III, et IV…
    Pour autant, de ce que j’ai entendu et compris, ces ouvrages rassemblent et classent tout ce qui peut être diagnostiqué comme  » troubles mentaux  » et/ou  » du comportement  » chez nos contemporains.
    Pour faire court, nous aurions tous un de ces troubles !? . Effectivement, si l’on considère qu’un accès ou excès de bonne humeur, ou de blues, ou une manie ( T.O.C ? ) , ou qu’une réaction trop ceci ou trop cela à un moment donné , doivent faire de nous un être perturbé , c’est 100% de la population mondiale qu’il faut soigner, et qui partira en vrille à un moment ou a un autre… ça fait peur !!!!!
    Toutefois, et si , pour faire ces diagnostiques , on immergeait un grand échantillon de cobayes humains et ce pendant plusieurs mois voire plusieurs années , dans un environnement paisible, ou tout le stresse que nous prenons violemment dans la figure quotidiennemment dans le monde du travail ou du non travail ( chômage ! ) , des transports en commun, finalement de tout ce qui est extérieur à nos vies propres , familiales et amicales, lesquelles resteraient les constantes de ces observations, je pense que pourraient mieux en resortir les troubles vraiment pathologiques , plutôt que laisser penser que nous sommes tous des névrosés psychotiques ….

    1. Attention tout de même à ne pas trop extrapoler, ni à se laisser contaminer par les théories conspirationnistes mêlant science, DSM, Capitalisme et industrie pharmaceutique.
      On peut lire partout qu’avec le DSM, on sera tous considérés comme des malades à dresser et à médiquer pour enrichir les labos…
      Première chose, en France, une grande partie de l’opposition active au DSM est menée par des psys qui veulent défendre la « spécificité » de la psychiatrie française : la psychanalyse.
      Le DSM, notamment le cinquième, est très critiquable, et il est très critiqué. Les critiques, notamment celles des milieux scientifiques ont pour certaines été prises en comptes, ce qui a conduit à renoncer à certaines catégories diagnostiques comme le fameux « risque de psychose ».
      Le mouvement psychanalytique, lui, ne tient absolument pas compte des critiques (l’histoire avec l’autisme le montre bien), à moins qu’elles soient internes et émanant d’une figure d’autorité. Et encore, l’histoire du mouvement nous montre que la psychanalyse, plutôt que d’évoluer, a procédé par scissions sans jamais jeter ce qu’il fallait jeter dans ses théories ou ses pratiques.
      Le DSM a ses limites, et ses risques mais la solution n’est certainement pas d’en revenir encore et encore à Freud.

      1. Merci pour cet éclairage…. Effectivement, pour une béoticienne ou candide en la matière comme moi ( je ne me dévalorise pas, je suis lucide sur le fait qu’on ne peut pas tout savoir sur tout !! ) , il peut être très difficile de faire la part des choses , et il peut être très facile pour les  » experts  » ( les fameux/fumeux ) de nous emmener dans leurs sillages .
        Forte, comme beaucoup, juste de mon expérience et mon vécu familial et amical, ainsi que quelques lectures de vulgarisation , j’aimerais bien ne pas me perdre ni me faire enfumer. D’où ma question .
        Définitivement, dépassons Freud , qui est encore aujourd’hui pour beaucoup, la seule alternative en psychanalyse , voire la seule religion.

      2. Votre pugnacité contre les psychanalystes (avec laquelle je suis en accord) vous incite à passer le fait suivant sous silence: Les catégories diagnostics permettent de valider la légitimité d’un médecin à procéder à un internement contraint. Au-delà de la qualité (ou même de l’existence) de « preuves » de dangerosité, le diagnostic ou mieux, la suspicion de diagnostic, semble, de fait, être un motif d’internement contraint pour lequel il faille parfois aller jusqu’à la CEDH pour pouvoir le contester.

        Indépendemment même du DSM3, 4, ou 5, la « psychose non-traitée » ou la « mégalomanie alléguée » sont des motifs de privation de liberté (appelons les choses par leur nom, sans fausse pudeur). Qu’en sera-t’il du DSM5? Est-ce que les tribunaux administratifs considéreront abusifs les internements contraints pour dépendence au café?

        Ou est-ce que ce sont des questions desquelles les psychiatres se lavent les mains en arguant qu’elles ne relèvent pas de leur domaine de compétence? Si « non », qui des psychanalystophiles ou des totalitaro-comportementalistes seraient les plus susceptibles de rationaliser ainsi leurs pulsions soignantes? J’ai (un peu) ma réponse, mais auriez-vous des données scientifiquement validées sur ce sujet?

        Cela date un peu depuis Rosenhan. On pourrait raffiner le protocole expérimental.

        Il n’y a pas que votre guéguerre (légitime) contre les psychanalystes qui importe dans ce débat.

        1. Un diagnostic ne constitue absolument pas un motif de soins sous contrainte. Je vous conseille de vous intéresser un peu plus à la loi concernée.
          Pour hospitaliser quelqu’un sans son consentement, il faut que deux conditions soient remplies : une dangerosité (pour soi-même, les autres, l’ordre public) et une incapacité à consentir aux soins. Les considérations diagnostiques n’ont rien à faire dans un certificat médical de soins sous contrainte. Le médecin doit y rapporter des faits, des symptômes indiquant cette fameuse dangerosité et l’absence d’adhésion aux soins.
          Par ailleurs, je vous rappelle que l’intérêt premier du diagnostic en psychiatrie comme en médecine n’est pas de stigmatiser mais d’identifier une maladie pour mieux la soigner. Le DSM quant à lui est principalement utilisé par les chercheurs et les compagnies d’assurances aux USA. Je n’ai encore jamais vu de psychiatre qui se ballade avec un DSM sous la main… Par ailleurs en France, c’est surtout la CIM-10 qui est utilisée pour coder les diagnostics et non le DSM.

          1. Oui, vous avez raison. Raison sur la CIM-10. Raison sur le but d’un diagnostic. Raison sur le contenu precis de la loi. Malheureusement, la theorie et la pratique sont deux choses differentes.

            Il n’est que difficilement contestable qu’en l’absence de danger, les justifications des hopitaux devant les tribunaux administratifs sont particulierement alambiquees. Un certificat de quinzaine justifiant la prolongation d’une hospitalisation contrainte au seul (je pese ce mot) motif de l’incertitude diagnostique me parait contradictoire avec l’esprit de la loi. En ce qui concerne la forme de la loi, je maintiens, preuve a l’appui, que les certificats medicaux initiaux censes etre circonstancies ne faisant etat que de « megalomanie » unspecified et de « refus de soins » fantasmagoriques sont amplement suffisants en pratique. En theorie, effectivement, comme vous le dites, ce n’est pas censes etre legal. Et en pratique, on a deja vu la CEDH declarer explicitement qu’une psychose non traitee n’est pas un motif suffisant d’internement, ce qui est conforme a votre position affichee, mais pas avec la pratique incriminee lors de ce proces.

            Nier l’ambiguite du lien entre categorie diagnostique et dangerosite qui sous-tend les argumentations d’hopitaux devant les tribunaux administratifs me parait profondement malhonnete.

            En ce qui concerne la theorie, je valide l’integralite de votre commentaire.

            L’utilisation du DSM par les chercheurs et les assurances meriterait un long billet de votre part. La CIM-10 n’est pas exempt de travers non plus.

            Par curiosite, Mr Thiriez, quand vous redigez des certificats medicaux pour des hospitalisations contraintes, vous arrive-t’il de faire des phrases completes pour decrire les faits que VOUS avez observes, ou vous contentez vous de balancer neufs noms communs sur un certificat pre-imprime en pretendant avoir consulte le bonhomme aux urgences alors qu’il est deja arrive a l’hopital psychiatrique et qu’on lui a enlever ses effets? (Je precise qu’il ne s’agit pas d’une attaque relative a mon cas, mais d’une question simultanement rhetorique et tres serieuse)

            1. Errata: qu’il ne s’agit pas d’une attaque *personnelle* relative a mon cas.

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