Ce qui cloche DANS la psychiatrie

Considérations

Ce billet est une réponse possible à celui intitulé Ce qui cloche AVEC la psychiatrie et une tentative d’explication (et non de justification) de ce qui nous conduit à clocher de la sorte.


Dans ses formes traditionnelles et le plus souvent actuelles, la psychiatrie conditionne ses acteurs à une considération négative du patient/usager, ainsi qu’à une vision inquiétante et pessimiste de son avenir.

Beaucoup de facteurs conduisent à cette appréciation négative, à commencer par un biais de confirmation des plus tenaces : ceux qui s’en sortent disparaissent le plus souvent de nos radars (hélas). Allez les chercher serait un effort trop couteux. Alors on ne les voit plus, on ne les entend plus, ce qui nous laisse baser nos prédictions sur ceux qui se présentent à nous, qui sont là et qui vont mal. Un deuxième biais de sélection bien cruel réside dans les faits divers associés à tort ou à raison à la psychiatrie : les médias parlent de meurtres, de suicides et d’attentats et non de rétablissement. Parallèlement, les théories les plus ancestrales qui règnent encore beaucoup sur la psychiatrie hexagonale nous poussent à croire que des gens malades resteront malades et que ceux qui s’en sortent ne l’étaient pas vraiment.

Un soignant évolue donc le plus souvent au sein d’un milieu psychiatrique dans lequel on lui rappelle sans cesse qu’un patient/usager est le problème plutôt que la solution, un risque d’aller mal plutôt qu’une chance d’aller mieux, une source de nuisance et de dangers plutôt qu’un nouvel espoir.

Le contrôle et la domination deviennent logiquement les attitudes les plus valorisées chez les professionnels.

La docilité et la soumission deviennent logiquement l’attitude la plus recherchée et la plus valorisée chez les patients/usagers.

Toute vision qui s’écarterait un peu de cette conception anxieuse de l’hypercontrôle et des rapports de domination/soumission se heurte au rappel douloureux des évènements les plus sombres qui auraient découlé d’une telle prise de risque et des drames futurs qu’il convient d’éviter à tout prix, y compris celui de la coercition.

Travailler en psychiatrie nous rend anxieux et nous incite à nous rassurer avec toujours plus de contrôle et de domination. La soumission nous rassure, mais la résistance et l’opposition nous poussent à la surenchère coercitive. Si la soumission survient enfin, qu’elle soit ou non feinte, elle ne durera pas très longtemps. Et le cycle recommencera.

Travailler en psychiatrie nous rend anxieux et nous incite à l’évitement, à fuir les problèmes sous couvert de théories qui nous immunisent contre la critique. Perdre de vue un patient/usager, c’est aussi essayer d’oublier les risques qui nous hantent sous prétexte qu’il ne veut pas se soigner, ou que son entourage est « toxique ». Mais tout cela ne fonctionne aussi qu’à court terme. Il en est de même pour toutes les tâches administratives, managériales et autres confections de parapluies percés dont certaines donnent l’illusion de nous protéger, de protéger les usagers/patients mais qui nous éloignent en réalité des gens que l’on doit soigner et entretiennent donc cette phobie du risque.

Ni l’hypercontrôle, ni l’évitement ne permettent d’éviter les drames, c’est une certitude. Mais c’est tellement rassurant…

Le moins mauvais remède à l’anxiété, c’est la prise de risque. Ça s’apprend, ça se dose (comme les médicaments) et ça sauve aussi des vies. Hélas, ce n’est pas suffisamment valorisé en psychiatrie.

Alors de quelles prises de risques s’agit-il ? Elles ne sont pas mieux proposées que par ceux qui auraient déjà dû en bénéficier. Il suffit de leur demander, de les écouter, de lire leurs témoignages et leurs blogs par exemple.

22 réflexions sur “Ce qui cloche DANS la psychiatrie

  1. La prise de risque en psychiatrie,necessite a mon avis une cohesion d’equipe c’est a dire des personnes formees et aptes individuellement a remettre en cause leurs certitudes.A mon avis,le patitent donne dans bien des cas la marche a suivre en s’opposant.C’est cette attitude d’opposition qu’il est important de considerer

  2. un billet que je trouve extrêmement léger, qui effleure à peine les problèmes ; mais qui témoigne assez bien du fait qu’il est très difficile de voir les dommages réalisés lorque l’on est en position de pouvoir (constat partagé par pas mal de patients dans leur relation avec leur psychiatre… que celui-ci soit de bonne volonté ne change rien, on ne voit pas ce qu’on a été formé à ne pas voir). … pour voir « ce qui cloche avec la psychiatrie », lire Foucault, il est tout à fait actuel (d’autant que les problématiques liées au « bio-pouvoir » augmentent sans cesse)

    1. Merci pour le compliment, et aussi pour les critiques! Bon c’est difficile d’approfondir sur un seul billet de blog mais j’y reviendrai. Vous avez raison de préciser qu’il ne s’agit pas forcément d’une question de bonne volonté ou de bienveillance. Les préoccupations d’un psychiatre doivent aussi se tourner vers des questions éthiques et vers le droit, et ne pas en rester à une fin qui justifierait les moyens.

  3. quand est il de la guérison en psychiatrie? c est surement le sujet le plus intéressant. Vous nous sorter un billet court mais un peu plus de pragmatisme serait le bienvenu

      1. Est ce que vous trouvez que le système psychiatrique actuel fonctionne bien et donne de bons résultats. Une autre question si on enlève la psychiatrie y aurait il de grande différence de résultat sur les patients car à part l’augmentation exponentiel des traitements prescrits pourquoi les troubles mentaux ne baissent t’ils pas?

        1. La question de Lee est très bien posée et je la partage.
          Je ne vais pas arrêter le teralithe, je sais trop ce que j’ai gagné et je ne voudrais surtout pas rechuter comme je l’ai déjà fait une fois. Même si je sais bien que lorsque j’avais arrêté j’étais très loin du but. Contente de participer au PTSM 69. On fait un super boulot. La guérison, c’est pas une blague.

  4. Vous parlez dans votre blog de traitement de ce qui cloche dans le système psychiatrique mais qu en est il de la guérison en psychiatrie?

  5. C est un bon billet, nous sentons dans vos propos un grand investissement personnel dommage que le modele actuel ne permette pas la guerison des patients. La question qui me taraude est qui doit surement vous travaillez est la grande majorite des patients qui consulte en psychiatrie vont ils mieux ou tres peu ou decline?

  6. La psychiatrie biologique attribue les comportements humains à des conditions physiques supposées du cerveau qu’elle appelle des « maladies psychiques ». Elle fait cela sans qu’il n’existe aucune maladie neurologique caractérisée, et sans preuve biologique de quoi que ce soit. Le but de ceci est depuis l’invention de la psychiatrie, de légitimer une discrimination des personnes désignées, et de les réduire à l’état d’objets-malades, peu à peu; par le traumatisme de l’hospitalisation forcée, la perte de leurs droits, l’intoxication chimique, le détournement de leurs ressources, l’exploitation de la crédulité des sociétés et des familles, le détournement de l’argent de la charité obligatoire au profit d’une entreprise de d’incapacitation chimique indéfinie des personnes désignées.

    On connait le chemin avec la prise de produits psychiatriques: les effets des produits présentés comme des manifestations d’une « maladie » supposée, la dépendance aux produits, l’aggravation, le syndrome de sevrage confondu avec une « rechute » d’une « maladie » supposée, le passage à l’acte, le désespoir, le suicide, la polymédication, la violence institutionnelle, les maladies iatrogènes, les psychoses d’hypersensibilité, la lobotomie chimique, les séquelles, la surcharge médicamenteuse et finalement la mort précoce.

    Une telle entreprise n’est pas seulement une charlatanerie, mais elle pérpétue un crime contre l’humanité.

    1. Bonjour,
      Je publie votre commentaire bien qu’il s’agisse davantage d’une tribune qu’une réponse à mon billet.
      Je me suis permis d’enlever les liens car je ne suis pas encore prêt à promouvoir un militantisme aussi poussé que le vôtre.
      J’adorerais que la psychiatrie n’ait pas besoin d’exister et je n’aurais aucun mal à trouver un autre boulot.
      J’adorerais abolir les soins sous contrainte aussi ainsi que les médicaments psychotropes.
      Le problème est qu’à l’heure actuelle, vos propos ainsi que votre blog sont finalement très peu informatifs et non scientifiquement sourcés. Et surtout, ils peuvent inciter des usagers à interrompre brutalement leurs soins et leur traitement, ce qui peut avoir des conséquences dramatiques.
      Merci d’être passé.

  7. Vous parlez de non scientifiquement prouve alors qu il n y a rien de scientifique en psychiatrie mais juste des dogmes. Le probleme des gens comme vous monsieur thiriez c est votre manque de courage on vous demontrerez scientifiquement que tout porte a croire que le systeme psychiatrique est dommageable aux patients, vous nierez meme les faits! La preuve est que vous censurez les commentaires des personnes le plus a meme de critiquer la psychiatrie c est a dire les patients. La lachete dont vous faites preuve est typique des hommes d aujourd hui vous prenez des decisions dont vous ne payez jamais les consequences et vous vous cachez derriere votre statut. Lorsque de trop nombreux patients meurent des traitements psychiatriques c est toujours la faute aux patients jamais des psychiatres qui sont souvent invulnerables.

  8. C’est sans haine que je vous dis que un et un font deux et que votre boulot sert à relier vos propres bouts. La fin de la phrase se termine par une lettre. La psychiatrie n’est qu’une parade zolienne tout autant que M.Trump est fou. Elle n’est qu’une preuve à l’alibi du pouvoir alors qu’il est si simple de pardonner. Beaucoup de génies et de personnalités seraient remis en cause, tout comme les opportunistes et les tricheurs qui ont façonné et qui continuent d’influencer la société.

  9. La Psychiatrie publique vit une crise grave, celle de voir disparaître sa capacité soignante. La psychothérapie, la chimiothérapie, les lieux hospitaliers ne remplaceront pas les méfaits d’une décomposition sociétale. Un coaching palliatif accompagne, mais ne fait rien changer. La psychose sous toute ses formes continue de marginaliser intérieurement l’inadapté, mais les « réponses » proposées déçoivent terriblement patients et « soignants ». Seule perdure, encadrée légalement, la fonction carcérale de l’hospitalisation sans consentement, telle que décrite par Hervé Bazin en 1949 dans « La tête contre les murs », et André Soubiran en 1953 dans « L’île aux fous ». Ce qui résiste aux mirages prométhéens des thaumaturges, c’est la contention de son prochain. Parfois, elle s’impose, certes. Mais l’essentiel est ailleurs: La Psychiatrie n’a pas les moyens de pallier l’incompétence des éducateurs parentaux et professionnels, incapables de transmettre une capacité à vivre en adultes responsables. Elle peut aider un individu fragilisé par un drame intercurrent, mais, pas plus que le juge des enfants, le psychiatre ne peut offrir de parentalité universelle. Pour rebondir, la Psychiatrie publique doit redéfinir son objet formel, ou fermer ses locaux pour inventaire, comme Basaglia en Italie.

  10. On en demande trop au psychiatre en realite ils n ont pas les moyens de guerir juste de pouvoir apaiser la souffrance humaine mais apaiser cette souffrance a quel prix?

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