David Healy est psychiatre, historien de la psychiatrie, chercheur en psychopharmacologie, et directeur du North Wales Department of Psychological Medicine, College of Medicine, Cardiff University, Bangor, Royaume-Uni. Il est internationalement connu pour ses recherches et écrits sur les psychotropes.
Ce cher David Healy est également l’une des plus grosses bêtes noires de l’industrie pharmaceutique dont il ne cesse de dénoncer l’influence néfaste sur la médecine. Parmi les principaux acteurs du débat mêlant Prozac® et suicide, il est également de ceux qui dénoncent depuis longtemps les conflits d’intérêts dans les milieux académiques concernés. S’il peut donc être considéré comme l’un des scientifiques les plus indépendants, sa longue croisade semble l’avoir conduit bien loin d’une certaine neutralité, ce qui se ressent inévitablement à la lecture de ce livre.
Il s’agit pourtant d’un ouvrage admirable, parmi les plus intéressants de la dernière décennie, du moins en ce qui concerne la psychiatrie. Tout bon prescripteur de psychotropes devrait l’avoir lu au moins deux fois dans sa vie, sinon davantage, même si cela compensera difficilement l’influence de nos visiteuses préférées. L’auteur nous incite évidemment à relativiser les effets thérapeutiques des psychotropes. Certaines informations sont certes déjà répandues mais gagneraient à l’être davantage : des antidépresseurs à peine plus efficaces que le placebo ou des antipsychotiques atypiques qui ne représentent finalement qu’un progrès limité par rapport aux neuroleptiques classiques, notamment en matière d’effets secondaires, le tout étant camouflé à la perfection par nos laboratoires préférés qui sont trop souvent au centre de la formation continue et pour qui l’enfance troublée constitue un investissement aussi durable que lucratif. David Healy s’appuie judicieusement sur une perspective historique et sur quelques études trop vite oubliées pour appuyer son entreprise de démystification.
Face à une nosographie en perpétuelle évolution, à des maladies dont les limites demeurent floues, et avec une pharmacopée globalement peu spécifique, la prescription en psychiatrie devient un exercice extrêmement complexe, sans parler des variations interindividuelles et les problèmes de sevrage. Ceux-ci, tout comme certains effets secondaires, sont encore trop souvent assimilés à des symptômes de la maladie pour laquelle le médicament est prescrit. S’il faut certainement s’inquiéter d’une tendance à médicaliser les états d’âme, nous ne devons pas oublier qu’il existe encore beaucoup de vrais malades non diagnostiqués et non (ou mal) traités. Il conviendra donc de s’approcher d’une sorte de juste milieu, pile entre diabolisation et idéalisation du médicament, ce qui n’est peut-être pas suffisamment précisé dans ce livre : un médicament n’est ni miraculeux, ni démoniaque, et doit être manipulé avec une pleine conscience de la balance bénéfices/risques. Et par-dessus tout, il apparait primordial de prendre en compte le point de vue du patient et de l’informer au maximum, celui-ci restant le premier concerné par les effets des médicaments.
Extrait sur Google books
Les médicaments psychiatriques démystifiés
David Healy, Traduit par : Monique Debauche
FICHE TECHNIQUE
ISBN : 978-2-8101-0116-0
Date de parution : 11/2009
Format (l x h) : 170 x 240 mm
Référence : 10116
Nombre de pages : 352
Langue de publication : Français
Marque/Éditeur : ELSEVIER
La question de la prescription excessive de médicaments psychiatriques en France comme en Belgique revient de plus en plus fréquemment sur la place publique. Dans ce contexte, cet ouvrage apporte une information sur chaque classe de médicaments à la fois très complète et indépendante de celle fournie par les firmes pharmaceutiques. Il replace la psychopharmacologie dans sa dimension historique, fait le point sur la réalité des connaissances actuelles en matière de psychotropes : leurs effets réels et leurs risques potentiels dans la pratique clinique. Certaines alternatives aux traitements médicamenteux sont également abordées. Adapté au lectorat francophone par une mise en concordance de la dénomination commune internationale des médicaments avec les noms de marques vendus en France, en Suisse, en Belgique et au Canada, cette traduction tient également compte des différences de pratique entre les mondes francophone et anglo-saxon. Il est destiné à la fois aux prescripteurs et aux professionnels qui travaillent avec les personnes prenant des médicaments psychiatriques.
SOMMAIRE
1. Introduction.
I – La gestion des psychoses.
2. Les antipsychotiques. 3. Les effets indésirables des antipsychotiques et leur gestion.
II – La gestion de la dépression.
4. Les antidépresseurs. 5. Les effets indésirables des antidépresseurs.
III – La gestion des troubles bipolaires.
6. La gestion des troubles bipolaires aigus. 7. Les stabilisateurs de l’humeur.
IV – Les médicaments psychiatriques chez les enfants.
8. Les médicaments psychiatriques chez les enfants.
V – La gestion de l’anxiété.
9. Les troubles anxieux. 10. Les benzodiazépines. 11. L’anxiolyse et le système sérotoninergique. 12. Les bêtabloquants et l’anxiété.
VI – La gestion des troubles du sommeil et de l’insomnie.
13. Les troubles du sommeil et l’insomnie. 14. La gestion non pharmacologique de l’insomnie. 15. Les hypnotiques. 16. Les sédatifs.
VII – La gestion des déficits cognitifs.
17. L’amélioration des performances cognitives dans les démences. 18. L’amélioration des performances cognitives et la neuroprotection.
VIII – La gestion des difficultés sexuelles.
19. Les différents types de difficultés sexuelles. 20. Les effets des médicaments sur les différents aspects des fonctions sexuelles.
IX – La gestion de la dépendance et du syndrome de sevrage.
21. La dépendance physique de type 1. 22. La dépendance physique de type 2. 23. La dépendance physique de type 3.
X – Le consentement, l’abus et la responsabilité.
24. Le consentement. 25. L’abus pharmacologique. 26. La responsabilité. XI – Le commerce de la tranquillité. 27. L’industrie éthique. 28. La psychiatrie biaisée par les preuves. 29. La commercialisation des désordres psychiatriques. 30. Des soins de santé à Pharmageddon.
Je suis aussi très réticent à propos des prescriptions massives de certains psychotropes dont on sait encore bien peu de choses, si ce n’est qu’ils ne sont pour la plupart même pas efficaces…
Ces fameuses doses « massives » étaient surtout données avec les anciens neuroleptiques « classiques » en des temps où les médicaments étaient encore moins spécifiques qu’aujourd’hui. Ceci n’empêche que les effets secondaires restent encore aujourd’hui la première cause d’interruption des traitements…
J’entendais aussi par là les anxiolytiques benzodiazépiniques. À titre d’exemple, ma grand-mère prenait un traitement du genre depuis il y a vingt ans – jusqu’à ce que je prenne à part son généraliste pour lui enseigner certaines subtilités de la pratique médicale, comme la consultation du feuillet indiquant les contre-indications… Notamment que la prise ne doit pas durer plus de six mois, et jamais de prescription pour les personnes de plus de 75a – soit presque l’âge auquel elle a commencé son traitement.
Je trouve scandaleux qu’un généraliste, qui par définition n’a pas reçu de formation aux psychotropes, ait le droit d’en prescrire à sa convenance.
Leur interdire ne serait pas la bonne solution, tout comme il s’avère parfois plus dangereux d’interrompre les benzodiazépines que de les poursuivre. En revanche, il serait nécessaire que les généralistes soient davantage formés en psychiatrie (c’est déjà le cas dans certaines régions) puisque cette activité constitue une part non négligeable de leur travail.
Quelles sont les contre-indications au sevrage progressif des benzodiazépines ? 😮
Il n’y en a pas, mais une démarche de sevrage n’est pas anodine et pas forcément souhaitable dans tous les cas.
Il faut toujours évaluer la balance bénéfices/risques.