Si établir un diagnostic en psychiatrie s’avère parfois difficile, l’annoncer ne l’est pas moins, notamment car ceci conduit presque inévitablement à aborder des notions de causalité. La recherche scientifique avance, trop pour certains, pas assez pour d’autres, mais il serait encore présomptueux d’affirmer à un patient que l’on sait précisément pourquoi il est malade. Il n’est pas forcément plus judicieux de répondre que l’on ne sait pas, et encore moins d’éviter la question ou de la renvoyer au patient (ex. la réponse est en vous).
On ne sait pas tout de cette causalité complexe, mais on ne sait pas rien non plus. L’hypothèse la plus probable à ce jour est celle du modèle stress-diathèse qui envisage la maladie mentale comme le résultat d’une interaction entre gènes et environnement. Un gène ne suffit pas, et plusieurs gènes ne suffisent pas toujours à traduire la vulnérabilité en maladie. Les ingrédients supplémentaires et nécessaires sont en général qualifiés de stress environnementaux regroupent des facteurs aussi variés que certains agents biologiques (virus, toxines etc.) ou des événement de vie (expériences difficiles, pas toujours négatives d’ailleurs). Cet impact du stress sur une fragilité génétique complexe aboutirait ainsi à l’émergence des symptômes de la maladie.
L’une des meilleures façons d’expliquer ce phénomène réside dans l’analogie du pont suspendu, une idée judicieuse que j’emprunte à Stephen M. Stahl dans son excellent ouvrage Psychopharmacologie essentielle :
Le poids de la génétique n’est certainement pas le même pour toutes les maladies : très important pour l’autisme ou la schizophrénie, beaucoup moins pour l’état de stress post-traumatique dans lequel l’environnement jour évidemment un rôle hautement plus décisif.
Ce modèle stress-diathèse n’est pas des plus glamours ni forcément facile à appréhender mais les patients gagneraient certainement à en être bien informés. Cette hypothèse a le mérite d’être au combien plus probable que d’autres qui consistent à tout mettre sur le dos d’un gène, d’une mère, d’une société ou encore d’un traumatisme prétendu oublié.